Interview de Martial Yvan Amolet, juriste et responsable du centre de droit de l’homme de Bayanga, structure de la société civile de Bayanga.
Le Tri-national de la Sangha est un complexe forestier transfrontalier partagé entre le Cameroun, le Congo et la République centrafricaine (RCA). Ce site du patrimoine mondial est très réputé pour son potentiel floristique et faunique, mais également pour « le peuple de la forêt » (couramment appelés Baka, BaAka, Mbenzele, etc.), des autochtones qui y vivent. La FTNS, depuis sa création, subventionne plusieurs initiatives afin de garantir le bien-être et le développement de ces derniers.
Me Martial Yvon Amolet, juriste et responsable du centre de droit de l’homme de Bayanga, structure de la société civile de Bayanga nous entretient sur ce volet ne 2020.
Qu’est-ce que la Maison des droits de l’homme de Bayanga ?
Qu’est-ce que la Maison des droits de l’homme de Bayanga ?
Initialement, crée en 1995 dans le cadre d’un projet de promotion de droit de culture des peuples autochtones, le centre a pour principale vocation de promouvoir les droits humains et l’accès de la justice pour tous dans la zone de Dzanga Sangha. Le Centre est géré par l’ONG nationale Maison de l’Enfant et de la Femme Pygmées (MEFP) et travail à travers 4 programmes :
Le premier est l’accès à la justice qui comprend le monitoring des droits de l’homme et aussi l’assistance juridique et judiciaire que nous portons à la société.
Le deuxième programme est celui de la formation et de la sensibilisation, justement, parce que la population n’est pas suffisamment informée sur ses droits et sur ses obligations.
Le troisième programme concerne l’état civil, en collaboration avec les mairies de Bayanga et de Salo, nous faisons délivrer des actes de naissance pour des enfants BaAka. Nous pensions aussi délivrer des cartes nationales, mais malheureusement les fonds sont insuffisants et nous sommes obligés de délivrer ces actes de naissance pour les enfants afin que ces derniers puissent exercer leurs droits civiques et leurs droits sociopolitiques, mais surtout pouvoir avoir accès à l’école en circuler librement.
Le quatrième programme c’est le plaidoyer. Quand nous avons des occasions, nous portons haut ce que nous faisons ici et en faisant cela, nous appelons l’opinion internationale à intervenir, à nous venir en aide, pour nous aider à étendre et vulgariser les notions de droits humains et ceux des peuples autochtones en particulier dans notre zone des aires protégées de Dzanga Sangha.
Nous travaillons également sur un mécanisme de gestion de conflits. Ceci a vu le jour après plusieurs réflexions, plusieurs contacts avec les communautés et les gestionnaires des parcs. Ce mécanisme s’appuie sur le socle des mécanismes traditionnels de gestion de conflits pour créer une plateforme, un cadre pour échanger entre la communauté et les parcs. Nous du Centre de droits de l’homme sommes indépendants de ces centres, nous jouons un rôle d’intermédiaire entre ces deux entités.
La cohabitation entre le parc et la communauté locale peut toujours créer des problèmes et si nous sommes à même de gérer nos conflits, nous pensons que c’est la meilleure chose que nous puissions offrir. Voilà en fait ce que nous faisons en matière de promotion des droits humains et des peuples autochtones en particulier.
Comment fonctionne le mécanisme de gestion des plaintes aux APDS ?
En ce qui concerne le mécanisme de gestion de plaintes, il est basé sur le système traditionnel de règlement de conflits. Le centre recueil les plaintes auprès du parc, ensuite les transmet directement à l’administration du parc qui vérifie ces informations et de prendre en concertation avec le centre (sur la base des règlements et statut de prendre les sanctions qui s’impose). Ceci permet de garder la cohésion sociale tout en réprimant ce qui peut engendrer les conflits puisque la communauté et le parc sont obligés de demeurer ensemble. Ceci est une aubaine pour la communauté de gérer paisiblement, les conflits dans le parc.
Vos réalisations en 2019 ?
Nous avons enregistré 167 cas de violations ayant été instruits et 3 ont été déposés devant le tribunal de grande instance de Nola. Ils suivent leur cours et vont aboutir bientôt à des procès. Nous avons abouti à 14 cas de conciliation sur 18 cas recensés.
En matière d’actes de citoyenneté, nous avons fait délivrer pour cette année 267 actes de naissance pour les enfants BaAka dans la zone.
En termes de sensibilisation, 32 émissions radio diffusées ont été réalisées à travers radio
Ndjoku FM. Nous avons également produit et distribué plusieurs supports juridiques aux chefs de quartier, aux chefs de service et aux autorités locales pour que ces éléments juridiques soient à leur portée et faciliter leur travail. Voilà en résumé ce que nous avons pu réaliser en 2019.
Quels sont les besoins actuels du Centre ?
En termes de besoins, le Centre aura besoin premièrement de renforcement de capacités de tous les membres (le juriste, des animateurs et des moniteurs communautaires). Un autre besoin est celui du soutien financier de tous les autres partenaires puisque le centre ne vit que de donations/subventions des partenaires. Nous avons par exemple besoin d’un véhicule, ce qui nous permettra d’être plus proche des communautés et aussi de les transporter devant les juridictions par exemple à Nola ou à Berberati. Voilà en résumé nos besoins.